ARTEMISIA

 

«Donner à voir, c’est toujours inquiéter le voir, dans son acte, dans son sujet. Voir, c’est toujours une opération de sujet, donc une opération refendue, inquiété, agitée, ouverte. »[1]

 

. Ce tableau  Judith et Holopherne  d’Artemisia Gentileschi (1593-1652) femme peintre du XVIIe siècle s’est imposé à moi pour traiter notre sujet, comment comprendre les processus à l’œuvre dans les médiations thérapeutiques en peinture?  C’est en passant par le processus créateur et le travail de la sublimation que nous allons tenter d’y voir clair.

Ce tableau est aux Offices à Florence, il se trouve dans la salle du Caravage, en face du Sacrifice d’Isaac. En écho, aucun commentaire, juste ces deux tableaux qui se regardent, qui se répondent. Judith et Holopherne avait été remisé dans un coin du palais jusqu’en 1777, soit pendant 165 ans, parce que trop violent.

Ce tableau peint en 1620, est le dernier représentant ce sujet, il y en a eu d’autres, nous allons voir cela. Il contient tous les autres tableaux d’Artemisia, il traite de Dieu, de guerre, de meurtre, de viol, de violence, et de la condition faite aux femmes, par les hommes. Comme dirait Roland Barthes, ce tableau est fort, clair, il a tous les « traits figuratifs d’un roman et sa beauté vient de ce qu’il participe d’une sorte d’énergie littéraire ».

Il me faut brièvement vous relater la vie exceptionnelle d’Artemisia pour ensuite revenir au tableau. Fille d’Orazio Gentileschi, lui-même élève du Caravage, elle a été élevée dans l’atelier de peinture de son père, nettoyant les pinceaux, broyant les pigments, observant le travail de son père. La mort précoce de sa mère a fini de lier la relation déjà étroite entre père et fille vers une peinture toute dirigée par les enseignements du Caravage. Enseignement, collaboration, admiration mutuelle mais aussi rivalité et exclusivité du père sur la fille. Ceci déboucha sur le refus de marier Artemisia.

Conscient du talent de sa fille et face à l’impossibilité pour une femme de s’inscrire aux Beaux-arts, il lui offre  la possibilité d’avoir un précepteur et de suivre des cours de perspective avec Agostino Tassi, peintre ami d’Orazio. L’apprentissage d’Artémisia ne se fit pas qu’à propos de la perspective mais aussi de la violence masculine en la personne d’Agostino qui la viola. Un procès s’en suivit, humiliant et torturant au propre comme au figuré pour elle, et au cours duquel il fut découvert qu’Agostino avait déjà une épouse et quelques enfants avec sa belle-sœur.. ce qui ne permettait pas un mariage avec Artemisia.

On peut dire de ce procès en 1612, lorsqu’on en lit les actes, qu’il est purement caravagesque ! Plein de rouge et de clairs-obscurs, de relents de mensonges et de vin, il vient nous montrer « le tout déversé : des écus d’or, des toiles signées (une Judith d’assez grande taille), le corps et les qualités d’Artemisia ; le tout échangé, volé, joué, foulé au pieds dans la métamorphose d’une unique marchandise, d’une unique pulsion : l’avidité »[2]

Le coupable en prison, pour fuir le scandale et l’influence de son père, Artemisia accepta un mariage avec le « petit » peintre Stattesi, ce qui lui permettait d’avoir un statut social indispensable pour une jeune femme qui de surcroît se destinait à la peinture.

Elle quitta Rome pour Florence où elle apprit à lire, à écrire, se cultiva avec ardeur, soutenu par son ami Galilée. La protection des Médicis, lui apporta célébrité et commandes, elle y fut la seule femme admise  au cabinet des dessins, instituions prestigieuse ; de là elle continua vers Naples où elle introduisit le caravagisme dans le sud de l’Italie. Elle finit par rejoindre son père pour l’aider à finir la commande de Charles 1er d’Angleterre. Les commandes terminées et la mort du père la ramenèrent vers l’Italie en traversant l’Europe.

Artemisia est la première femme à peindre l’histoire et les thèmes religieux, à une époque où ils étaient considérés comme hors de portée d’un esprit féminin. Elle peindra des tableaux où  elle choisit des thèmes de femmes en prise ou en révolte contre le pouvoir masculin (avec nos mots d’aujourd’hui): Suzanne et les vieillards, Salomé, Loth et ses filles, Judith et sa servante, Judith et Holopherne (1620). Elle les peindra de façon récurrente, au fil des années jusqu’à la dernière version de Judith et Holopherne, tableau qui me paraît un aboutissement, le vrai travail du peintre ; le travail de la sublimation est passé par là pour que l’œuvre émerge. Je ne veux certes pas dire que les autres sont des brouillons. Vous allez voir sa maîtrise, très jeune du portrait, des scènes, bibliques de plus souvent, mais cette œuvre, l’Oeuvre contient et dépasse l’histoire biblique, l’histoire personnelle, pour accéder à une représentation, une « interprétation » d’une condensation dense pour insister sur le mot condensation.

Regardons ce tableau, une lumière crue illumine une scène de violence, sortie du noir, de la nuit, du rien, du noir comme lumière absolue, fidèle au Caravage en cela. La scène se présente comme si elle venait à être éclairée par une seule source de lumière, venant du haut qui attire, capte notre regard. Dans le même temps que l’on peut avoir l’impression que des personnages, de la couleur même des tissus sort la lumière. L’apport particulier d’Artémisia à la peinture de cette époque  est dans les couleurs, et plus particulièrement ce qu’on appellera le jaune d’Artémisia, issu du jaune d’Orazio, son père.

Au premier plan, du sang jaillit en jets drus menaçant de nous éclabousser. Eva Menzio[3]se demande si le seul mouvement de Judith ne consiste pas à se préserver le plus possible afin que le sang ne vienne pas souiller sa « robe neuve de soie jaune ». J’interpréterais volontiers le mouvement d’évitement de Judith qui me semble perceptible, du côté de la souillure, la souillure de ce sang de violence ennemie.

La couche est rendue avec un soin extrême. Dans la version latine de la Bible, elle est appelée le lectulus : lit de table, lit funèbre ou lit nuptial. Ceci nous rend compte déjà de la polysémie de l’histoire.

R. Barthes remarque que cette scène est une exhibition de membres entrelacés que l’on peut lire « comme un étal de viandes ou une combinaison de postures amoureuses, si les deux femmes devaient violer le général, elles ne s’y prendraient pas autrement » ! Renversement des rôles, où le religieux et « patriotique »  est sur-imprimé par  une violence féminine ? Les deux femmes sont présentes à l’inverse de la situation biblique où la servante attend dehors. Là, elles sont associées pour venir à bout d’une énorme masse. La différence sociale des deux partenaires est bien marquée par les vêtements, la posture, l’expression.

La servante a un visage inexpressif, paisible comme si elle tuait un porc, somme toute, la maîtresse maintient fermement à distance la « masse à tuer », elle a un air dégoûté, quoique résolu. Si l’on renverse l’image on voit que le visage d’Holopherne est très personnalisé, il regarde. Ce qui est particulier dans le tableau d’Artemisia, c’est d’une part que les femmes sont vêtues de robes du XVIIe siècle et d’autre part, que la décapitation est représentée, très précisément au moment où le glaive est à la fin de sa course, là où la tête va se détacher.

Cette œuvre est une « réélaboration » d’une autre, peinte dix ans auparavant où elle avait représenté Holopherne avec le visage de son violeur Augustino Tassi et Judith, le sien. Ce tableau est à Naples, au musée Capodimonte.

Quelles questions donc ? La question du traumatisme, de la répétition, répétition à l’identique ou transformations face aux mécanismes de création.  Ce qui ne sera pas œuvre au sens strict chez les patients que vous rencontrez, mais développement de la créativité et production dans la rencontre d’un atelier, ceci trouvera cependant des similitudes avec les processus sublimatoires dans la création d’une œuvre.

Tout d’abord un petit tour sur les approches de la création

La théorisation des rapports entre sublimation et création dans la théorie psychanalytique apparaît tributaire de la conception freudienne de l’art. Freud centre son investigation sur les sources pulsionnelles inconscientes du processus créateur, en soulignant que « Les forces pulsionnelles à l’œuvre dans l’art sont les mêmes conflits qui poussent à la névrose d’autres individus »[4]. Selon cette perspective, il conçoit la création artistique comme une transformation et une élaboration des fantasmes inconscients de l’auteur, grâce à une activité artistique de substitution et de sublimation :

« Si la personne en relation hostile avec la réalité possède ce don artistique, qui, psychologiquement,  reste pour nous une énigme, elle peut transposer ses fantaisies en créations artistiques et non en symptômes, échappant ainsi au destin de la névrose et regagnant par cette voie détournée sa relation à la réalité »[5].

L’artiste échapperait donc à la névrose dans la création et les formations de sublimation apparaissent à la place des symptômes, au cours d’un processus sublimatoire où le créateur échange le but pulsionnel proprement sexuel contre un but désexualisé. Le fondateur de la psychanalyse définit par ailleurs le travail créateur de l’artiste comme le fait de «donner corps aux formations de sa fantaisie »[6], à la source de la satisfaction sublimatoire trouvée par l’artiste dans sa création. L’activité créatrice du processus sublimatoire s’effectue donc en puisant, en quelque sorte, dans l’activité fantasmatique et l’œuvre apparaît comme une mise en forme des fantasmes du créateur.  Freud a ainsi privilégié l’analyse des contenus inconscients d’une œuvre, au détriment de sa forme, ce qui correspond à une conception classique de l’art. Cette assignation de la sublimation dans le processus créateur à un échange du but pulsionnel proprement sexuel contre un but désexualisé, ainsi qu’au registre du fantasme et des désirs inconscients du créateur limite la compréhension des processus de création, notamment en ne permettant pas, comme nous le verrons ultérieurement, de rendre compte d’une partie de l’art contemporain ni du rôle joué par la forme dans l’oeuvre d’art. Il s’impose cependant de ne pas simplifier ni caricaturer la perspective freudienne et de souligner que Freud n’a pas pour autant proposé une psychanalyse de l’art, qui consisterait à ramener le contenu de l’œuvre aux théories psychanalytiques, mais qu’il s’est interrogé sur le processus créateur de l’œuvre d’art et son effet sur le récepteur de l’oeuvre. Le fondateur de la psychanalyse a donc moins mis l’accent sur une psychanalyse de l’art en lui-même que sur l’analyse du processus de la création.

 

Le texte principal de Freud sur la question de la sublimation dans les processus de création est celui du Souvenir d’enfance de Léonard de Vinci[7], où il met en lumière les sources du processus créateur et de son inhibition chez l’artiste, en particulier dans la création picturale.

  Freud pointe alors les limites de la psychanalyse, impuissante à expliquer l’énigme du don du créateur, en particulier « son extraordinaire capacité à la sublimation des instincts primitifs » :

« Comme le don et la capacité de réalisation artistiques sont en corrélation intense avec la sublimation, force nous est d’avouer que l’essence de la réalisation artistique nous est, elle aussi, psychanalytiquement inaccessible »[8].

Le texte de Freud sur Léonard de Vinci montre aussi le rôle du traumatisme de la séduction dans la sublimation : ce dernier engendre un excès d’énergie libidinale qui peut soit être destructeur soit être converti en création par un processus de sublimation. L’activité sublimatoire de l’artiste, préformée dans l’enfance, s’originerait donc dans sa capacité de se rendre maître du traumatisme.

K. Eissler[9] souligne, à l’appui des Carnets de Léonard, que celui-ci ressent le flot des impressions visuelles comme une effraction par un afflux d’excitations à maîtriser dans l’activité créatrice : l’artiste conseille en effet de repérer des scènes précises dans des formes indéfinies et il témoigne d’une vigilance compulsive contre l’irruption traumatique d’images, pour se défendre d’un afflux de stimuli potentiellement désorganisateurs. On pourrait ajouter à ce propos que la pulsion de voir, pulsion partielle, joue un rôle important dans la sublimation esthétique et que la contemplation artistique en constitue une dérivation sublimée.

 

H. Segal[10] à son tour reprendra ces thèses kleiniennes sur la création. En revanche, elle se penchera sur la création littéraire. Elle insistera sur  la notion de « poussée » à créer, d’un travail psychique accompli et de création d’un monde nouveau par le biais du symbole. Ce symbole, comme tout symbole, n’est pas une copie de l’objet, il est Les contributions de l’école anglaise ont prolongés cette approche. Ainsi Mélanie Klein s’est attelée à comprendre les mécanismes à l’œuvre dans la création en général, elle a eu recours aux angoisses et mécanismes de défense psychotiques et à l’usage des notions de bons et de mauvais objets pour apporter une explication aux mécanismes de la création. La proposition kleinienne[11] autour de la création situe le moment fondateur dans la position dépressive. Celle-ci va permettre la formation des symboles, éléments disponibles pour la sublimation, et le besoin de réparation des destructions opérées fantasmatiquement sur l’objet. M. Klein fait un lien direct entre ce besoin de réparation et l’origine de l’impulsion créatrice. Créer, c’est réparer l’objet aimé, détruit et perdu, c’est le restaurer, comme objet symbolique, symbolisant et symbolisé et lui donner une certaine permanence. En réparant l’objet, le créateur création. Le monde créé par l’artiste est une re-création, une reconstruction. En reprenant le texte de Freud, elle regrette qu’il ne se soit pas saisi de ses développements métapsychologiques ultérieurs, la perlaboration des conflits notamment, pour poursuivre sa réflexion.

D. Winnicott en élaborant autour de la créativité, ouvrira une réflexion sur la place du Moi. Il pointera sa place centrale dans les mouvements de transformations des matériaux psychiques et d’échanges avec les autres instances de la psyché. Il développera la notion de Moi/non-Moi qui ouvrira un « espace transitionnel» où l’idéal se situe, et aussi la vision d’un Moi dont les frontières pourraient être envisagées de façons « transformables » dans les processus créatifs.

 

Le décollage créateur n’emprunte pas une voie unique, les auteurs à la suite de Freud l’ont abordé par différents biais : symbole, symbolisation, travail de la psyché, travail de la pensée, sublimation enfin, où processus primaires et processus secondaires sont à l’œuvre.

 

Alors Artémisia. Comment passer de la crudité du traumatisme à une forme de perlaboration, un travail de sublimation qui va se développer d’œuvre en œuvre. Quel travail psychique ?

 M de M’Uzan reconnaît chez l’artiste un caractère fréquemment débordé par un excès de force pulsionnelle. « L’artiste, donc, se voit menacé par le système qui, précisément, devrait le protéger. Ceci n’a rien de surprenant si l’on admet avec Freud qu’il est probablement doté d’une constitution instinctuelle anormalement forte et que, par conséquent, ses système d’adaptation risquent constamment d’être mis en échec, de telle sorte qu’il est exposé plus que quiconque aux situations conflictuelles. Nous comprenons dès lors que le foisonnement de l’imagerie intérieure ne puisse être dominé par le seul jeu d’une élaboration autarcique, ce qui reviendrait à une forme d’aliénation. L’artiste au contraire est conduit à se tourner vers les autres, devant lesquels il décrit sa situation intérieure et trouve là une confirmation de son existence. » [12]

Nous devons donc toujours penser à l’excès. Excès aussi que le traumatisme subit par Artémisia. Excès que son procès, excès que sa vie employée à son développement d’artiste dans ce siècle d’hommes. Nous sommes dans la quantité. L’œuvre viendra remplir _pour un temps plus ou moins perdurable_ cette marge d’inadéquation entre la pulsion et ses investissements. Après le quantitatif, le qualitatif

Winnicott distingue deux niveaux dans le qualitatif. Le niveau de création le plus courant est le témoignage, le compte-rendu. Autrement dit, tel état a été éprouvé et il s’agit de le faire connaître, partager au lecteur, à l’auditeur, au spectateur.. Les productions créatrices exceptionnelles sont signées par un autre niveau : une expérience est advenue qui n’a pas été enregistrée, ni même éprouvée comme telle car il n’existait pas encore un sujet pour l’éprouver, soit que l’expérience fut un choc, si inattendu, si perturbant, si brutal qu’il n’y eut plus un sujet pour la ressentir. Tout surgissement d’une pulsion déferlant inopinément dans sa pleine force est de cet ordre : une rupture et non une expérience, s’il n’y a pas dans l’environnement une présence-soutien-contenante ; L’œuvre va tisser sur les traces laissées par ce surgissement. Autour de l’impensé, de l’inommable, de l’irreprésenté, de l’inéprouvable, l’œuvre compose des images plastiques. Le travail de création est soutenu, stimulé, altéré par des représentations inconscientes de ce travail qui gravitent autour de deux grands thèmes : la sexualité et la mort.

Le processus créateur ne peut en effet aboutir que s’il met en jeu un processus de resexualisation, soit une sexualisation secondaire du traumatisme par l’activité artistique, qui se manifeste dans la possibilité même de transposer ces états originaires catastrophiques, dans une œuvre, c’est-à-dire de passer du registre du senti à celui du figurable.

Dans cette perspective, les sources du processus créateur consistent aussi souvent à déployer dans l’activité artistique des stratégies de survie pour échapper à la mort psychique[13].

Il s’agit donc d’élaborer grâce à la création des expériences qui n’ont pas pu être appropriées subjectivement et restent en souffrance de symbolisation[14]

Cette conception de la sublimation dans l’activité artistique conditionne l’approche psychanalytique  du processus créateur d’une œuvre, qui visera bien moins à éclairer l’inconscient du créateur - il n’est pas sur un divan, engagé dans un processus d’associations libres - qu’à tenter de saisir la dynamique des processus d’émergence et de mise en œuvre des représentations, sans se focaliser sur la recherche de contenus inconscients matriciels organisateurs de l’œuvre. Dans cette perspective dynamique, la lecture psychanalytique d’une œuvre doit rester vigilante au risque de réduction à l’archétypique, et à l’écueil d’un repérage systématique de contenus renvoyant aux fantasmes originaires.

Ne serait-il pas aussi fécond de poser d’abord la question centrale du travail de sublimation créatrice opérée par l’artiste, autrement dit de sa capacité d’intégration grâce à l’œuvre qui symbolise de façon toujours renouvelée les traces d’expériences anciennes ?

Le travail psychique de la création, créer n’est pas que se mettre au travail. Il faut se laisser travailler dans sa pensée consciente, préconsciente, inconsciente et aussi dans son corps, dans son Moi corporel, ce jusqu’à leur jonction, leur dissociation et leur réunification toujours problématique. Pour trouver des métaphores dans ce registre D.Anzieu nous parle de travail d’accouchement, d’expulsion, de défécation, de vomissement. Le créateur travaille au corps à corps le matériau qu’il a choisi tout comme la création lui arrache des souffrances.

 

 

 

Dans le tableau d’Artemisia, ce sont deux femmes plantureuses, deux matrones pourrions-nous dire qui règlent le sort du général! Quelle transformation ! Nul doute que le tableau dégage une force bien différente de celui du Caravage qui est au plus près du récit biblique. Le saut qu’a fait Artemisia est conséquent : condensation de sa propre histoire, interprétation personnelle de l’histoire biblique. Ce tableau soustrait à la vue convoque le spectateur dans ce qu’il porte de plus archaïque en lui.

 «Mais seul un détour interminable a permis d’accéder à l’instant où, visiblement, les contraires paraissent liés, où l’horreur religieuse, donnée, nous le savions, dans le sacrifice, se lie à l’abîme de l’érotisme, aux derniers sanglots que seul l’érotisme illumine.»[15]

 

 

 



1.     [1] Didi-Huberman G. (1992) Ce que nous voyons, ce qui nous regarde, Editions de Minuit, Coll Critique, p 51

 

[2] Sauzeau-Boetti AM (1981) Notes sur une fresque in Actes d’un procès pour viol en 1612 Ed Des Femmes

[3] Menzio Eva, (1981) Autoportrait en muse de la peinture in Actes d’un procès pour viol en 1612, suivi des lettres de Artemisia Gentileschi, Ed Des Femmes

[4] Freud S., 1913, OC XII.

[5] Freud S., OC X, p 50.

 

[6] Freud S., 1929, OC XVIII, p 266

[7] Freud S., 1910a, OC X, p 79-164.

[8] Ibid., p  163.

[9] Eissler K., 1980.

[10] Segal Hanna (1993), p. 153-157.

[11] Klein Mélanie (1968).

[12] M. de M’Uzan, (1964) Aperçu sur le processus de la création littéraire 1977, in De l’art à la mort

[13] Brun A., 2012a, 2012 b.

[14] Roussillon R., 2011, p 5-10.

[15] Bataille G 1961 Les larmes d’Eros JJ Pauvert p 239

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